29 janvier 2013 Théâtre

La Réunification des deux Corées

La réunification des deux Corées ou l’amour impossible… Joël Pommerat signe d’une main de maître une mise en scène aussi réaliste et moderne que poétique sur la quête difficile de la paix au sein du couple.

Création de Joël Pommerat

Ateliers Berthier/Théâtre de l’Odéon, Paris
Du 17 janvier au 3 mars 2013

Avec Saadia Bentaïeb, Agnès Berthon, Yannick Choirat, Philippe Frécon, Ruth Olaizola, Marie Piemontese, Anne Rotger, David Sighicelli, Maxime Tshibangu

Entre amour et haine

Les futurs mariés © Elisabeth Carecchio

Les futurs mariés © Elisabeth Carecchio

La Réunification des deux Corées se compose d’une vingtaine de moments dramatiques aux dimensions aussi diverses que leurs climats : une « mosaïque » de « nouvelles », qui raconte les histoires de plusieurs couples en tension, l’un prêt à se marier, l’autre en train de se séparer, une femme et un homme qui surprennent leur mari et épouse respectifs ensemble, un homme subissant la perte de mémoire de sa compagne malade, une mère face à l’autorité de son mari quant au devenir de leur enfant, un couple sans enfant, un homme tenté par le désir que suscite une prostituée croisée dans la rue, scènes de ménage mais aussi scènes d’amitié se succèdent ainsi.

Une configuration de l’espace qui contribue au climat de confrontation de la pièce

La Réunification des deux Corées © Elisabeth Carecchio

La Réunification des deux Corées © Elisabeth Carecchio

La scène est une allée, que parcourent les comédiens entre deux gradins de spectateurs qui se font face comme pour mieux se regarder en miroir. Le public, enfermé dans ce dispositif expérimental, est comme pris à parti. La pression qu’imprime sur le plateau les deux haies de regards et la masse de l’audience est ressentie par chacun. Par contraste, la scène bifrontale laisse à ses deux extrémités la zone de jeu et les gradins se terminer sur des issues qui semblent appeler un mouvement de fuite. Pommerat a disposé un défilé : entre nos deux Corées de spectacteurs, un no man’s land où nul ne peut résider, espace contraint, passage obligé où les corps, un instant, s’engagent les uns après les autres, comme les grains d’un sablier, avant de poursuivre hors champs leur trajectoire mystérieuse et banale.

État des lieux sur l’étrangeté des relations humaines

Deux femmes © Elisabeth Carecchio

Deux femmes © Elisabeth Carecchio

Il incombe désormais au spectacteur de contribuer activement à bâtir un autre type de cohérence à base d’échos, d’affinités de forme ou de contenu, d’inflexions et de variations autour du thème de l’amour – quel que soit le sens que l’on donne à cette expérience fondamentale que nous partageons tous dans nos vies, ne serait-ce qu’en éprouvant son absence. À partir de quelques-unes de ses figures, Pommerat esquisse une sorte d’état des lieux à l’orée du XXIe siècle, posant quelques balises au bord d’un territoire commun pour nous offrir d’en reconnaître encore, toujours, l’étrangeté.

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