6 avril 2014 Patrimoine

« Le Cyclop », une archi-sculpture entre nature et culture…

22,50 mètres de haut, 350 tonnes d’acier ! Le Cyclop, également appelée « La Tête » ou « Le Monstre dans la forêt » est une sculpture-architecture du suisse Jean Tinguely. Au cœur du bois des Pauvres à Milly-la-Forêt, dans le département de l’Essonne, en Île-de-France, cette « archi-sculpture », environnée de végétation, évoque le dialogue permanent entre nature et culture…

Près de trente œuvres qui ne font plus qu’une

L'Oreille du Cyclop ; le wagon sur la gauche de la photo

L’Oreille du Cyclop ; le wagon sur la gauche de la photo

Cette sculpture habitable faite de béton et de fer représente une tête à l’aspect d’un cyclope. Le monstre possède un œil unique. Au centre de son visage, une bouche béante laisse sortir une immense langue-toboggan qui retombe au sein d’un petit bassin rempli d’eau. Imbriqués dans la sculpture, tels des poumons, quatre chênes centenaires font partie intégrante de l’œuvre. L’Oreille du monstre, qui pèse une tonne, oscille lorsque le système interne de l’œuvre monumentale est activé ; immense appareil auditif qui manifeste l’écoute attentive de la sculpture à l’égard de la nature qui l’entoure…

L’immense Tête sans corps abrite en son centre un univers surprenant où le spectateur est invité à suivre un parcours labyrinthique pour découvrir des œuvres variées et complémentaires, des sculptures sonores, un petit théâtre automatique et à l’emplacement du cerveau, une machinerie formidable aux engrenages de ferraille aussi fascinants qu’hétéroclites, intitulée la Méta-Harmonie.

La Meta-Harmonie du Cyclop

La Meta-Harmonie du Cyclop

Niki de Saint Phalle, compagne de Tinguely est à l’origine de la face tapissée de milliers de petits miroirs ; le choix des miroirs permet de refléter la forêt et ainsi ancrer l’œuvre dans son contexte environnemental ; à l’intérieur de la sculpture, un carrelage en damiers noir et blanc au premier étage et une statue aux cornes d’abondance colorées au second sont sont aussi des touches de l’artiste.

Au-dessus de l’entrée est visible un gros tuyau. Il s’agit d’un conduit d’aération du Centre Pompidou que Pontus Hultén a donné à Tinguely.
Un habitacle destiné aux artistes avait été installé en hauteur afin de permettre à ceux-ci de dormir quelques jours sur place. Le wagon d’un train est également suspendu en hauteur, dans lequel des poupées figurant des juifs rendent hommage aux victimes du génocide.

Le bassin

Le bassin au sommet du Cyclop

Au sommet du Cyclop un grand bassin est rempli d’eau. Il s’agit de l’Hommage à Yves Klein. L’eau reflète le ciel bleu ce qui rappelle les Monochromes de Klein.

Chaque œuvre présente une énigme et une clé permettant de développer une réflexion riche à partir d’un angle d’approche donné, artistique, historique ou philosophique…

Un projet extraordinaire

En premier plan sur la droite, le tuyau provenant du Centre Pompidou...

En premier plan sur la droite, le tuyau provenant du Centre Pompidou…

Cette œuvre d’une grande richesse qui réunit quatre mouvements artistiques : le dadaïsme, le Nouveau Réalisme, l’Art cinétique et l’Art brut, est un monument unique dans l’histoire de l’art contemporain.

Avec Le Cyclop, Jean Tinguely a voulu créer une construction hors norme, exceptionnelle par sa taille, sa richesse artistique, son ingéniosité technique mais aussi par sa situation insolite dans la forêt de Milly.

C’est aussi et avant tout le fruit d’une aventure collective, tissée de liens d’amitié, une utopie réalisée au cours de nombreuses années par « une équipe de sculpteurs fous » réunie autour de la personnalité de Jean Tinguely.

« En travaillant dans la forêt, nous rêvons à une utopie et à une action sans limite (c’est illusoire je le sais) et notre attitude est celle de la Recherche de l’Acte Gratuit et Inutile. Et nous sommes très heureux comme ça, pourvu que personne ne nous empêche de travailler (comme des fous – ça va de soi). »
Jean Tinguely

Quelques dates

Cloche du Cyclop et statue de Niki de Saint-Phalle en arrière plan sur la droite

Cloche du Cyclop et statue de Niki de Saint-Phalle en arrière plan sur la droite

En 1969, le chantier du Cyclop démarre dans la forêt de Milly. Jean Tinguely savait que la seule manière de mener à bien le projet de la Tête, était de financer lui-même les travaux, ainsi il pourrait travailler en toute liberté.
Aucun architecte ne participera à la construction et seuls les artistes, avec courage, force et ténacité, bâtirent progressivement cette sculpture titanesque.
Il aura fallu dix ans de labeur pour ériger le Cyclop et quinze années supplémentaires avant que soient mises en place les contributions de chacun. Jean Tinguely et Niki de Saint Phalle financèrent l’ensemble.
En 1987, pour assurer sa protection et sa conservation, ils décidèrent de donner le Cyclop à l’État français.
En 1991, à la mort de Jean Tinguely, Niki de Saint Phalle se chargea, en respectant au mieux les idées de son compagnon, de terminer la sculpture en finançant les derniers travaux.
En mai 1994, Le Cyclop fut inauguré par François Mitterrand, Président de la République et ouvert au public. Niki de Saint Phalle décida alors que Le Cyclop était achevé et que désormais, aucune œuvre ne pourrait être ajoutée.

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